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Chants frondeurs au cœur de l’Amérique noire

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Christophe Ylla-Somers s’est plongé dans l’histoire tortueuse de la communauté africaine-américaine de 1619 à nos jours. Il constate dans son livre, « Le Son de la Révolte », que le nouveau monde ne fut jamais la terre d’égalité, de justice et de démocratie, prônée par les premiers colons européens. Les États-Unis se sont construits sur un déséquilibre social patent que les arts ont souvent dénoncé. Alors que l’élection du 5 novembre 2024 attise les tensions outre-Atlantique, nous explorons en musique quatre siècles de rébellion et de contestation.

Dès l’instauration du commerce triangulaire, la vie des Africains expatriés contre leur gré vers des territoires inconnus devint un calvaire innommable. Les traditions et coutumes ancestrales résistèrent cependant à l’oppression, aux brimades et humiliations de toutes sortes. Cette empreinte identitaire s’exprima dans des chants de complainte émouvants dont la teneur de plus en plus protestataire traversa les siècles. Le poète et dramaturge Amiri Baraka répétait sans cesse ce simple constat : « À partir du moment où nous avons embarqué sur ces bateaux, nous avons commencé à chanter ! Quelle que soit la forme d’expression, le message a toujours été le même : « Laissez-moi sortir ! Laissez-moi tranquille ! Cessez de vouloir transformer ma vie ! ». Avant même que nous ne soyons en contact avec les Américains, nous chantions déjà le désespoir, dans le dialecte local, puis dans un langage afro-américain. Depuis toujours, nous chantons la contestation. Comment voulez-vous que nous ayons des paroles positives ? Quand on vous pourrit la vie depuis des lustres, comment être optimiste et voir les choses du bon côté ? On ne sait pas ce qu’est le bonheur ! Quand votre existence, c’est l’esclavage, vous ne décidez pas de protester, vous protestez instinctivement ». (Amiri Baraka au micro de Joe Farmer – RFI - Février 2004)

Dans les spirituals ou dans le blues, dans le répertoire sacré ou dans les mélodies profanes, le besoin de trouver le réconfort est omniprésent. Cette aspiration à une liberté pleine et entière se fracasse pourtant souvent sur une réalité plus âpre et violente qui conduit irrémédiablement les victimes d’injustices à se rebeller. Si l’appel à une résistance passive du pasteur Martin Luther King reste dans les mémoires, ce sont davantage les œuvres militantes qui résonnent aujourd’hui avec force dans « L’épopée des Musiques Noires ». Le manifeste du batteur Max Roach, « We Insist ! Freedom Now Suite », est devenu un marqueur de la fronde artistique des jazzmen en 1960. Le pamphlet du bluesman J.B Lenoir, « Alabama Blues », en 1963 est lui aussi redoutablement efficace. Le brûlot de Nina Simone, « Mississippi Goddam », en 1964 s’inscrit également dans le tumulte des années de lutte. Décennies après décennies, l’activisme musical s’est transformé et les prises de positions tranchées ont accompagné les évolutions stylistiques des instrumentistes africains-américains.

« Le Son de la Révolte » constate avec acuité l’impossibilité de faire valoir son statut de citoyen américain quand la couleur de peau interdit l’égalité des chances. Il subsiste alors la revendication permanente que les arts peuvent porter. Les prêches harmonieux des cantiques religieux, comme la poésie cadencée de rappeurs déterminés, traduisent la même frustration et le même désir d’être respecté. Lorsque Sam Cooke chantait « A change is gonna come », quel avenir envisageait-il ? Les tourments de son époque ont-ils changé la donne ? La politique américaine a-t-elle tiré les leçons du mouvement des droits civiques, de la poussée de fièvre « Black Lives Matter » ? L’examen de conscience est-il possible outre-Atlantique ? Les musiciens ont-ils la clé de cette énigme ? Ces interrogations légitimes rythment notre lecture avide de cet ouvrage riche et fort documenté paru aux éditions « Le Mot et Le Reste ».

«Le Son de la Révolte», éditions Le Mot et le Reste.

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Dès l’instauration du commerce triangulaire, la vie des Africains expatriés contre leur gré vers des territoires inconnus devint un calvaire innommable. Les traditions et coutumes ancestrales résistèrent cependant à l’oppression, aux brimades et humiliations de toutes sortes. Cette empreinte identitaire s’exprima dans des chants de complainte émouvants dont la teneur de plus en plus protestataire traversa les siècles. Le poète et dramaturge Amiri Baraka répétait sans cesse ce simple constat : « À partir du moment où nous avons embarqué sur ces bateaux, nous avons commencé à chanter ! Quelle que soit la forme d’expression, le message a toujours été le même : « Laissez-moi sortir ! Laissez-moi tranquille ! Cessez de vouloir transformer ma vie ! ». Avant même que nous ne soyons en contact avec les Américains, nous chantions déjà le désespoir, dans le dialecte local, puis dans un langage afro-américain. Depuis toujours, nous chantons la contestation. Comment voulez-vous que nous ayons des paroles positives ? Quand on vous pourrit la vie depuis des lustres, comment être optimiste et voir les choses du bon côté ? On ne sait pas ce qu’est le bonheur ! Quand votre existence, c’est l’esclavage, vous ne décidez pas de protester, vous protestez instinctivement ». (Amiri Baraka au micro de Joe Farmer – RFI - Février 2004)

Dans les spirituals ou dans le blues, dans le répertoire sacré ou dans les mélodies profanes, le besoin de trouver le réconfort est omniprésent. Cette aspiration à une liberté pleine et entière se fracasse pourtant souvent sur une réalité plus âpre et violente qui conduit irrémédiablement les victimes d’injustices à se rebeller. Si l’appel à une résistance passive du pasteur Martin Luther King reste dans les mémoires, ce sont davantage les œuvres militantes qui résonnent aujourd’hui avec force dans « L’épopée des Musiques Noires ». Le manifeste du batteur Max Roach, « We Insist ! Freedom Now Suite », est devenu un marqueur de la fronde artistique des jazzmen en 1960. Le pamphlet du bluesman J.B Lenoir, « Alabama Blues », en 1963 est lui aussi redoutablement efficace. Le brûlot de Nina Simone, « Mississippi Goddam », en 1964 s’inscrit également dans le tumulte des années de lutte. Décennies après décennies, l’activisme musical s’est transformé et les prises de positions tranchées ont accompagné les évolutions stylistiques des instrumentistes africains-américains.

« Le Son de la Révolte » constate avec acuité l’impossibilité de faire valoir son statut de citoyen américain quand la couleur de peau interdit l’égalité des chances. Il subsiste alors la revendication permanente que les arts peuvent porter. Les prêches harmonieux des cantiques religieux, comme la poésie cadencée de rappeurs déterminés, traduisent la même frustration et le même désir d’être respecté. Lorsque Sam Cooke chantait « A change is gonna come », quel avenir envisageait-il ? Les tourments de son époque ont-ils changé la donne ? La politique américaine a-t-elle tiré les leçons du mouvement des droits civiques, de la poussée de fièvre « Black Lives Matter » ? L’examen de conscience est-il possible outre-Atlantique ? Les musiciens ont-ils la clé de cette énigme ? Ces interrogations légitimes rythment notre lecture avide de cet ouvrage riche et fort documenté paru aux éditions « Le Mot et Le Reste ».

«Le Son de la Révolte», éditions Le Mot et le Reste.

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